La décision de la HAAC de suspendre jusqu'à nouvel ordre tous les médias appartenant au groupe de presse La Gazette du golfe passent mal dans l'opinion publique au Bénin. Ce jeudi 10 août 2023, Landry Angelo ADELAKOUN, Romaric ZINSOU, Miguèle HOUETO, Fréjus ATTINDOGLO, et Conaïde AKOUEDENOUDJE, tous Juristes de nationalité béninoise, ont déposé un recours en inconstitutionnalité contre la suspension par la HAAC du Groupe de Presse “La gazette du golfe”.
Selon le recours consulté par Libre Express, les requérants demandent à la Cour constitutionnelle de déclarer que la décision portant mesure conservatoire contre le Groupe de Presse “La gazette du Golf “ est contraire à la Constitution. Il demande à la Cour de dire et de juger que le Président de la HAAC a violé la Constitution.
Les requérants exposent que par décision N°23-031/HAAC du 08 août 2023 portant mesure conservatoire contre le Groupe de Presse “ La gazette du Golfe “, le Président Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC) a suspendu “tous les moyens de communication de masse du Groupe de Presse La gazette du Golfe” (Golfe Télévision, Golfe FM, l’hebdomadaire Gazette du Golfe et leurs canaux digitaux, jusqu’à nouvel ordre”.
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Ils affirment également que le deuxième considérant de ladite décision signée du Président de l’institution fait référence au communiqué 23/HAAC/PT/SG/SCS du 03 août 2023 invitant les acteurs des médias à faire preuve de plus de professionnalisme et au respect scrupuleux des dispositions constitutionnelles et légales dans le traitement de l’information relative à l’apologie des coups d’État en Afrique et dans la sous-région. « Toujours dans son deuxième considérant, il ressort que malgré la publication et la diffusion de ce communiqué, le Groupe de Presse La gazette du Golfe “ à travers ses moyens de communication de masse ne s’est pas exécuté. Que considérant la “ gravité des faits et l’urgence” des mesures conservatoires méritent d’être prises. C’est d’ailleurs ce qui justifie la décision querellée », signalent-ils.
Les réquerants exposent « que si tel que rappelé dans le premier considérant toute tentative de renversement d’un régime constitutionnelle est un crime dont l’apologie est inadmissible, intolérable dans toute société démocratique, il appert de relever que loin d’être une réponse à la promotion des principes et valeurs démocratiques, la décision N°23-031/HAAC du 08 août 2023 portant mesure conservatoire contre le Groupe de Presse “ La gazette du Golf “ est plutôt attentatoire aux libertés fondamentales et surtout au droit à l’information et la liberté presse pierre angulaire de toute démocratie sérieuse ».
Des violations alléguées par les requérants
Dans leur recours introduit devant la Cour constitutionnelle, les réquérant se basent sur la loi N° 2019-40 du 07 novembre 2019 portant révision de la loi N° 90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin et plusieurs textes internationationaux . « L'article 7 de ladite Constitution dispose que “ les droits et les devoirs proclamés et garantis par la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples adoptée en 1981 par l’Organisation de l’Unité Africaine et ratifiée par le Bénin le 20 janvier 1986 font partie intégrante de la présente Constitution et du Droit béninois”. Quand la loi est claire, point d’interprétation . Il faudrait juste se rendre à l'article 23 pour lire blanc sur noir que “ toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience, de religion, de culte, d'opinion et d’expression ...”. Cette liberté de pensée est reconnue tant aux simples citoyens qu’aux journalistes ainsi qu’aux médias. Malheureusement, à travers la triste et malheureuse décision du 08 août 2023, la HAAC a préféré dans une logique dont elle est sûrement la seule à avoir le secret. Que deviennent lesdites libertés lorsque la HAAC semble se muer en une épée de Damoclès sur la tête des médias ?», se demandent-ils.
Pour ces citoyens si le Constituant béninois de 1990 a pensé faire de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication une institution constitutionnelle, ce n’est pas pour la voir exceller dans la restriction du droit à l’information et la liberté de presse. D’ailleurs, ils signalent que l’article 142 de la Constitution dispose que la “ Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication a pour mission de garantir et d'assurer la liberté et la protection de la presse, ainsi que de tous les moyens de communication de masse dans le respect de la loi”.
L’accomplissement de cette mission implique que la HAAC doit prioriser des voies et moyens qui concourent à l’effectivité de la liberté de presse. Il est donc clair que la décision de suspension du Groupe de Presse “ La gazette du Golfe” frise une méconnaissance aiguë de notre ordonnancement juridique, de l’esprit de la Conférence des Forces vives de la Nation et de la Constitution qui en est issue. Cet état de chose est surprenant pour une institution qui dire lutte contre l’”apologie des coups d’État “. Car ce manteau que l’institution se donne n’est possible que lorsque l’on connaît et met en œuvre les principes et valeurs de la démocratie, le mode d’accession par excellence au pouvoir étant, en démocratie, les élections. Mais l’on se voit dans l’obligation de reconnaître avec ce grand homme d’Etat allemand qu’il faut vraiment être démocrate avant de prétendre la défendre.
Les réquerants estiment que l’on se retrouve dans une situation où au lieu de travailler à garantir les prévisions de l’article 8 de la Charte africaine qui énonce que “ la liberté de conscience, la profession et la pratique libre de la religion sont garanties que la HAAC semble créer une moule dans laquelle elle souhaite voir les médias jouer leur rôle. « La HAAC aurait aimé voir tous les médias applaudir l’offensive de la CEDEAO qui souhaite tantôt bombarder le Niger, tantôt négocier avec les Putschistes pour remettre le Président BAZOUM au pouvoir. Finalement, la HAAC tout en condamnant l’apologie des coups d’État parce que fortement condamnable, adopte un modus operandi qui frise l’apologie de la pensée unique dans un pays démocratique », reprochent-ils.
« Restant toujours avec la Charte africaine des droits de l’homme et des Peuples, l’article 9- 1 consacre le droit à l’information en ces termes : “Toute personne a droit à l’information”. Ce droit se trouve malheureusement effrité face au coup de hache de la HAAC. Oui, en considération des nombreux instruments juridiques et de la jurisprudence constante de la Cour constitutionnelle, la décision de la HAAC est une entorse grave au droit à l’information. Dans une société démocratique, les tentatives de promotion de la pensée unique et de l’arbitraire ne sauraient s’eclorent. Si l’Institution estime qu’un média a égratigné les règles, elle a l’obligation de tenir compte d’un minimum acceptable dans une société démocratique pour prendre ses sanctions. Dans le cas d’espèce , l’on assiste à une sanction disproportionnée. Un sacré coup à la démocratie que l’on prétend défendre », soutiennent-ils.
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