C'est un tournant majeur dans la politique minière du Niger. Réuni sous la présidence du Général d'Armée Abdourahamane Tiani, le Conseil des Ministres a adopté jeudi 19 juin 2025 une décision historique : la nationalisation de la Société des Mines de l'Aïr (SOMAÏR), principal acteur de l'exploitation de l'uranium dans la région d'Agadez depuis plus de cinquante ans.
Créée en 1968 et exploitant l'uranium nigérien depuis 1971, la SOMAÏR était jusqu'alors une coentreprise détenue à 63,4% par le groupe français Orano, géant du nucléaire, et à 36,6% par la société publique SOPAMIN. Mais ce statu quo n'est désormais plus d'actualité. Selon les autorités de Niamey, le comportement « irresponsable, illégal et déloyal » d'Orano, conjugué à un déséquilibre flagrant dans la commercialisation de la production, a précipité cette décision de nationalisation.
Depuis la rupture des relations diplomatiques entre le Niger et la France en juillet 2023, le groupe français aurait multiplié les actes hostiles à l'encontre de la SOMAÏR. Retrait de personnel, blocage des opérations, déconnexion informatique, tentative de revente de parts et même procédure judiciaire : Orano est accusé d'avoir cherché à saboter les activités de la société.
De plus, les chiffres montrent que 86,3% de la production cumulée de 81 861 tonnes d'uranium depuis le début des activités ont été enlevés par Orano, contre seulement 9,2% par SOPAMIN. Une répartition jugée totalement déséquilibrée et préjudiciable à la souveraineté nationale par le gouvernement nigérien.
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Face à cette situation, l'État a choisi de reprendre le contrôle intégral de la SOMAÏR. « Les actions et le patrimoine de la SOMAÏR sont intégralement transférés, en toute propriété, à l'État du Niger », indique le communiqué officiel lu sur la télévision nationale du Niger. Cette nationalisation s'inscrit dans une volonté affirmée des autorités de Niamey de regagner la maîtrise des secteurs stratégiques du pays, jusqu'alors dominés par les intérêts étrangers notamment français.
Le gouvernement espère ainsi permettre « une gestion plus saine, durable et équitable des ressources minières, au bénéfice direct du peuple nigérien ». Les anciens actionnaires, dont Orano, recevront une indemnisation, tout en étant tenus de respecter leurs obligations en matière de réhabilitation environnementale. La direction actuelle assurera la transition en attendant la nomination d'une nouvelle équipe de gestion.
Cette décision historique marque un tournant décisif dans la politique minière du Niger. Elle devrait permettre au Niger de regagner une plus grande souveraineté sur son uranium, une ressource stratégique pour son développement économique. Un enjeu de taille pour les autorités de Niamey, qui entendent désormais être les seuls maîtres à bord.
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